Salon d'écriture année 2016


30 janvier 2016
Pour démarrer cette nouvelle année, le salon d'écriture s'est déroulé à Mamers sous le signe des contes. 
Avec jeux de découpages et de collages.

Ecrire le monde du haut de mon arbre
En laissant le temps se disperser
En laissant le temps se poser
Le regarder passer
Le sentir m'effleurer
Et écrire le monde vu d'ailleurs



30 avril et 30 mai chez Séverine
Autour des cartes du tarot

LA SCENE

Texte de Nathalie

Ce n'est vraiment pas le moment de transpirer d'angoisse ! Ce rôle ne peut être que pour moi ! Je l'ai travaillé, répété à en perdre le sommeil... 
Devant le miroir des toilettes, je colmate les effets désastreux du vieillissement, d'abus en tout genre. Malheureusement, les rides se creusent, mes yeux s'enfoncent, entourés de ces cernes aussi sombres qu'inesthétiques. Ce visage fané précocement n'encourage pas les metteurs en scène à me choisir pour les premiers rôles. Au contraire, ils me réservent les habits de la vieille alcoolique que tous les spectateurs adoreront détester. 
Finalement, quelque peu désabusée, j'observe ce reflet avec indulgence. Les stigmates de mes bonheurs et épreuves s'y concentrent. Mon regard conserve la flamme et l'énergie de mes 20 ans, cela devrait suffire pour me faire remarquer ! J'envoie à mon double quelques paroles positives qui ricochent sur la surface lisse et froide du miroir imperturbable. Après avoir frotter mes joues vigoureusement, j'affiche une mine joviale du plus bel effet. 
Au moment où je m'apprête à retourner dans la salle d'attente du casting, une top-model, blonde, élancée, une taille menue, des jambes au galbe idéal, un buste à chavirer et une tête flirtant avec la perfection fait son entrée triomphale dans ce lieu d'intimité. Je reste hébétée devant ce concentré de beauté ; seul les magazines couchent, sur leur papier glacé, ces phénomènes, digne d'être protégés tant ils sont rares ! Mes aisselles recommencent à suinter d'énervement, piqué d'une dose de jalousie. La raison m'abandonne pour laisser place à la mesquinerie d'une femme aux abois devant une telle injustice. Pourquoi vient-elle marcher sur mes plates-bandes ? Elle aura plein d'autres occasions pour briller alors que moi...c'est ma dernière chance ! C'est ce que m'a dit mon attaché de presse lorsqu'il m'a proposé cet essai. Je commençai à rêver à des rôles sérieux, pouvant enfin tourner la page des tournages publicitaires où l'humiliation est quotidienne : femme d'intérieure naïve, femme carotte ou bien encore déguisé en vilain puceron qu'un gentil produit peut éliminer sans faire souffrir la belle fleur. Mon cœur de gagnante se fondait dans le scénario appris par cœur pour plus de réalisme dans mon jeu. Il a suffit d'une seconde, d'une rencontre malheureuse pour que mes espoirs se brisent en mille morceaux. 
« C'est toi le rôle de la statue ? » ose-t-elle me lancer avec son sourire narquois, découvrant ses dents d'une blancheur éblouissante. Cette attaque frontale ne parvient pas à ébranler mon immobilité parfaite. Déjà, elle ne fait plus attention à moi, elle m'ignore comme un vieux meuble qui moisit dans une cave humide. Elle sort sa trousse de maquillage de marque, bondée de produits hors de prix. Sa jeunesse, son allure de petite fille gâtée, me donnent la nausée. 
D'habitude si conciliante, je sens la vulgarité et la violence remonter dans mes veines, en sens inverse du débit sanguin. Une véritable tempête se prépare. Je ne peux ni ne veux en maîtriser la fougue. 

La bombasse, sûre d'elle, colore se lèvres charnues d'un rouge vif, sanguin. C'est une provocation ! Mes poings se serrent, ma bouche se tord, mes yeux se préparent à sortir de leurs orbites sous la pression. Avec une rapidité digne d'un record du monde, je lui fait avaler son tube, emballage compris (pas de détail!). Puis, ensorcelée, je gave mon oie avec son mascara, ses crayons, tout ce que je trouve dans cette trousse de malheur. Elle doit déjà regretter de ne pas vouloir faire confiance au grain naturel de sa peau juvénile ! Le gosier surchargé, la jeune beauté perd de sa superbe sous l'angoisse que cette attaque lui fait subir. Son teint de porcelaine éclate pour se couvrir de tâches bleues immondes, ses yeux azurs se noient sous le rouge des petites veines qui éclatent les unes après les autres à cause du manque d'oxygène meurtrier. De mon côté, guidée par un instinct guerrier, je lui pince le nez pour accélérer son agonie. 
Soudain, son corps de déesse s'affale, comme ça, lourdement, sans élégance sur le carrelage froid, dernier linceul pour cet être si gracile. 
Un instant, j'ai eu l'impression que j'observais cette scène de l'extérieur, sortie de mon propre corps : un tas de muscles inerte, avachi sur le sol, une meurtrière folle plantée à ses côté, les yeux fixés sur son œuvre macabre. Aucun sentiment ne semblait traverser ma conscience, juste un sourire diabolique se peignait progressivement sur mon visage. 
L'atmosphère est devenu vite irrespirable jusqu'à ce que j'entende : «coupé ! OK, on la garde, elle est parfaite ! »           
  


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